Parfois les associés jouent à la marchande, à la maitresse, aux pompiers, au paysan, bien sûr, mais bien marqués par l'actualité, ils viennent de se lancer dans un nouveau jeu d'imitation : le GIGN.
Samedi après-midi, alors que ça tournait en rond sévère chez les quatre loustics et que lassée de les avoir dans les jambes à entendre "on s'ennuiiiie Maman" je les ai envoyés dehors.
Zorro a lancé "eh les gars! si on jouait au GIGN !!".
Ni une, ni deux, ils étaient postés dans la cour de la ferme, chacun planqué derrière un ballot de paille ou le tas de sable, ou un poteau pour traquer les terroristes.
GLOUPS.
Au début, devant leur manège et leur bâton/fusil, je suis intervenue.
"Oh bah non, c'est bizarre comme jeu. Vous voulez pas faire des tours de cour à vélo en vous chronométrant, plutôt? "
Et là, Rosette est sortie du bureau avec son plan d'action béton.
Elle s'était auto-nominée Capitaine des opérations et ses frères n'avaient pas bronché.
Deux familles d'accueil (là c'est la situation de petits copains à l'école qui les marque…) étaient prises en otage et il fallait les libérer. Deux prises d'otage simultanées.
Ca m'a retournée un peu qu'ils rejouent "les événements " ainsi.
Ils avaient besoin de faire le bien. Enfin c'est ce que je me suis dit.
Bref, je les ai laissés sauver les deux familles.
Et puis ils sont rentrés.
"Ils se sont rendus, on peut goûter maintenant".
PS : on leur a expliqué ce qui s'était passé. Zorro a lu l'édition du Petit Quotidien sur la tragédie et je l'ai accompagné du mieux que j'ai pu. Rosette et Pierrafeu ont posé moins de questions et Milou n'en a posé aucune.
Mais comme tous les enfants, ils ont tous été touchés.
De près ou de plus loin.
Commentaires
Les enfants sont des éponges.
C'est bien qu'ils fassent ressortir tous ça.
Bon courage et félicitations pour ta bonne gestion de la situation.
Merci, j'avoue que j'ai ri en voyant leurs dessins :-)
J'ai lu parmi la foule d'articles sur le sujet que c'était très bien si les enfants "rejouaient" ce qui s'était passé, c'était leur façon d'extérioriser, et ensuite point final pour eux.
Quand j'en ai parlé à mes twins, ils ont réfléchi et ont fini par me demander "mais les terroristes, ils avaient fait un plan?". Quand je leur dit oui, et que même il était plutôt efficace ce plan car on ne les avait pas encore retrouvés, ils sont restés sans voix! Un plan pour de vrai, ça dépassait leur imagination!
Wow. Outre le fait que ça a du vous interpeller pas mal, je les trouve drôlement intelligents vos petits associés.
Et la dernière phrase est touchante. Ils ont vraiment tout compris apparemment.
Ouep ...
Ici, Chichi, 4 ans dans 2 mois, a caché ce qu'il transforme en épée mais qui sont des morceaux de circuit voitures en disant qu'il ne fallait pas que les "monsieur" les trouvent quand ils nous attaqueraient.
T-Biscuit, lui, a soudainement envie de faire 1 an d'armée quand il sera grand.
Chupa n'en parle pas vraiment mais je sais que cela lui a fait peur, elle a fait quelques cauchemars. Et dans sa lettre à sa correspondante martiniquaise, elle a écrit : "Il y a eu un attentat à Paris. C'était terrible. Mais ils sont morts maintenant". C'est un gros raccourci difficile à comprendre mais elle voulait dire qu'elle était soulagée de savoir que les terroristes étaient morts.
Je crois que maintenant, nous, les parents, nous faisons tous les gros yeux quand nos enfants veulent jouer avec pistolet ou à la guerre ...
Je trouve ça rassurant que les enfants extériorisent ce genre d'expérience traumatisante... Les miens ont d'ailleurs baptisé un jeu de structure gonflable : le jeu du suicide... Guère mieux.
"Ils se sont rendus, on peut goûter maintenant" ça m'a mis les larmes aux yeux.
Ils ont extériorisés c'est l'essentiel.
Chez nous aussi, comme dans des milliers de familles, il a fallu posé des mots sur cet évènement qui révèle "le mauvais versant" de la nature humaine.
Pas simple de choisir des mots adapté à l'âge des enfants, rester neutre, ne pas véhiculer un message de jugement (sous le coup de l'émotion)
Un situation plus proche de nous amène aussi débats et questionnements avec les enfants. C'est épuisant, mais nécessaire et riche.
On habite tout près du fameux projet de barrage de sivens qui crée beaucoup de discussions localement. Le soir en rentrant de l'école mes enfants jouent à Sivens : y en a un qui fait le policier l'autre le zadiste...
Oui on va dire qu'ils extériorisent...
Je pense que c'est normal. J'avais moi-même 9 ans au moment des attentats du 11 septembre, et je me souviens qu'avec mon frère, on avait fait voler des avions en papier dans des tours de kapla. (À ce jour on va tous les deux bien et on n'a jamais tué personne^^)
mon ainé a aussi entrainé son frère à ce genre de jeu après l'événement.
Il m'a vu faire des gros yeux et il m'a répondu "t'inquiète pas maman, c'est pour jouer"
je crois que le jeu, comme le dessin, ou parler, c'est libérateur…