Matin pas bonheur

Je viens d'emmener les trois petits associés au bus scolaire et j'en reviens avec une boule dans la gorge.

Ce matin je n'ai fait que crier. On peut même dire hurler.

J'ai du être derrière Rosette, Pierrafeu et Milou, pour tout.

"Allez on descend là! Je vous ai réveillé, il y a déjà 10 mn"

Une fois tous les trois au petit-déj, je me suis demandé à un moment si Marcel Béliveau n'était pas ressuscité et j'ai cherché les caméras cachées. Rien dans la boite de Nesquick, ni dans la bouteille de lait, encore moins derrière une porte. Non, les associés ne jouaient pas un sketch, ils étaient le sketch.

"Tais-toi et bois ton lait. Mange ta tartine. Bois ton lait. Arrête de parler. Allez, on avance. Milou, mange s'il te plaît. Pierrafeu, bois ton lait. Rosette, ARRÊTE DE PARLER ET MANGE. Pierrafeu, j'en ai marre que tu me dises que ton lait est froid alors que tu mets 20 mn à le boire. Non, je ne le réchaufferai pas..."

Après le petit-déj, là je me suis demandé si EN FAIT on avait pas fait régresser mes associés pendant la nuit. 
Comme d'habitude je leur ai lancé en montant à la salle-de-bain : "vous vous habillez pendant que je me douche". En 12 mn, j'étais douchée, vitecrémée et habillée quand en arrivant dans la chambre des garçons je les ai trouvés en train de bouquiner des BD. EN PYJAMA. Même pas à poil. Je leur avait pourtant dit "il faut vraiment vous habiller vite, tout est prêt, vous n'avez plus qu'à sauter dans vos fringues et monter vous brosser les dents."

C'est déjà arrivé plein de fois mais on avait carrément plus d'avance. Là il était 8h05 et il fallait partir dans 7 mn.

Alors j'ai braillé et quitté la chambre histoire de garder pour moi tous les jurons qui me passaient par la tête. Milou s'est habillé en 20 secondes et est monté se brosser les dents. Je m'étais trompée de jean pour Pierrafeu lui donnant un de ceux de Milou mais il a préféré replonger dans sa BD plutôt que de m'en demander un autre.

A 8h10, le voyant mi-habillé, j'ai pensé aller me recoucher façon allez-vous-faire-voir-démerdez-vous.

Une fois le bon jean enfilé, j'ai pressé les troupes : on met les chaussures, on prend les manteaux!!

"Non, pas "ai" de aigrette Milou, c'est "oi" de oie, c'est une oie sur le dessin de ton cahier
PAS UNE AIGRETTE!! (histoire vraie, gosse de la campagne, va!)

Et là pendant que je montrais juste à Milou le son "oi", j'ai vu Rosette qui s'était tranquillement assise sans avoir mis ni chaussures, ni manteau, qui nous regardait, attentive, espérant que Milou donne la bonne réponse.

"ROSEEEEETTTTTTTTTTTTTTTE TES CHAUSSURES! TON MANTEAU!

MAIS QU'EST-CE QUE VOUS AVEZ CE MATIN? "

Je pense au complot. "Allez, les gars, elle est crevée la Pédégère, hier déjà on a bien donné, mais ce matin on l'a fait craquer. Elle devra être derrière nous pour tout : se lever, manger, boire, s’habiller, se brosser les dents, mettre son manteau, mettre ses chaussures, et bien sûr devra le répéter plusieurs fois à chacun de nous, OK?"

Voilà c’est certain, c'est ça.

A moins que ce soit le contre-coup d'hier. Mon paysan de mari ne faisant à nouveau qu'un avec son tracteur, on ne le voit pas beaucoup. Hier, j'ai passé la journée à faire la loi entre les associés, j'ai couru pour les activités de chacun, j'ai cuisiné toute la mâtinée pour n'avoir que soupe à la grimace le midi, j'ai du aller chercher les associés dans les 4 coins de la ferme "noooon, je veux pas rentrer, j'ai pas eu le temps de jouer au sable/au ping pong/cueillir des jonquilles/faire du vélo"

Ce matin n'était pas différent d'un autre, on fait souvent avec un timing serré (et ce même s'ils sont levés plus tôt, sont hyper bavards et leeeeents) mais moi j'étais plus à cran.

Et eux moins réactifs.

On a eu le bus. Sans courir.