L'été sera costaud

Ceux ou plutôt celles, qui me suivent sur les réseaux sociaux ont pu le lire il y a longtemps, le changement est annoncé pour cet été dans l’entreprise. Ce loooong teasing n’était pas voulu, je n’ai pas réussi à vous donner de nouvelles avant.
Car justement votre Pédégère va regagner l’entreprise.

Je retourne au salariat à la fin du mois de juillet et je suis un peu… morte de trouille.
Ca faisait quelques mois que je commençais à saturer de travailler en free-lance. Travailler de chez soi en pleine cambrousse c’est parfois passer une semaine sans voir personne et ne parlons pas d’espace de coworking, inexistant, ou d’aller bosser à la bibliothèque de Saint-Robert qui ferme pendant midi. Et puis il y a eu ces missions qui commençaient à me lasser, pas que ce n’était plus intéressant, mais j’avais fait mon temps.

Mais si je retourne travailler « à l’extérieur » n’est-ce pas à cause de cette place que je n’ai jamais su trouver en travaillant de chez moi ?

La réponse est oui. Mes associés (bien que ça allait mieux sur la fin) n’ont jamais vraiment réussi à comprendre la limite entre maman est dispo et maman est au boulot. Parce que maman était là physiquement, ils s’en fichaient pas mal que maman ne soit pas dispo mentalement. Enfin, ils ne s’en fichaient pas. Leur maman était là, point.  Elle pétait régulièrement les plombs à grands cris « Mais laissez-moi travailler bordel ! » mais ils ne lui en tenaient pas du tout rigueur, se glissant dans son bureau chacun deux fois dans l’heure avec un « oui pardon maman mais est-ce qu’on peut manger des cookies au goûter ? » ou « oui je sais que tu travailles mais tu peux m’aider pour mon évaluation d’Histoire ? ».

C’est en très grande partie de ma faute car depuis que je suis en free-lance, j’ai toujours été hyper disponible pour eux. Même quand ils ne me demandaient rien. Comme si, moi-même, je ne pensais pas vraiment travailler. Alors que je rendais mes piges, que je ne facturais pas du vent. Et que l’argent rentrait. J’ai fait des allers-retours au collège, je n’ai pas délégué, ou beaucoup trop peu, les rdv orthophonistes, ergo, psy et j’en passe. Même à Grand Mari quand il le pouvait.

J’ai remis sacrément les pieds en cuisine, avec du fait maison à tout va, j’ai fait le taxi activités presque sans broncher.
J’étais sur tous les fronts (sauf celui de la lessive, faut pas déconner non plus).

Et puis je me suis mise à crier. Plus fort qu’avant. Tout le temps. Pour tout.

C’était le signe qu’il fallait que je change quelque chose.

Et c’était bien évidemment mon activité pro.

Je m’étais épuisée, j’étais épuisée.

Pour être tout à fait honnête, j’ai cherché souvent à retrouver un travail salarié pour aussi mettre un peu de distance entre mes enfants et moi. Mais avec ces deux premières années plus que compliquées au collège pour Pierrafeu, c’était difficile de m’imaginer arriver en pleurs au bureau plusieurs fois par semaine.

En mai, j’ai senti qu’il fallait non seulement que je change ma façon de travailler mais qu’il fallait aussi que je décroche un peu de ma famille. Que je cesse de tout vouloir gérer surtout quand ça pouvait largement se faire sans moi. Et pour moi, ça passe obligatoirement de ne plus être à la maison H24. Parce qu’ici je vois tout, je sais tout, j’entends tout : le sac de sport oublié, les devoirs à faire le soir, le frigo vide, les fringues qui traînent, les jouets pas rangés, la vaisselle dans l’évier , les lamentations au retour de l'école et du collège parfois oubliées au dîner… enfin vous voyez le tableau. Avec cette reprise d’activité, ça ne va pas s’améliorer, ce sera même pire, mais au moins je ne serai pas là pour voir. Enfin sauf le soir en rentrant, ahaha.

Et si j’ai la trouille c’est parce que ça fait longtemps que je n’ai pas pratiqué les horaires de bureau, la hiérarchie directe et surtout que je vais travailler 32 h (devinez quelle demie journée j'ai choisi...). GLOUPS. Et ne plus avoir aucune flexibilité, non plus.

Et ne plus être là pour eux. Tout le temps.

Ce sera un poste que je n’ai jamais occupé, dans un domaine que je ne connais pas. J’ai tout à apprendre et c’est ce qui me motive le plus.

Et puis il y aussi un nouveau rebondissement dans la scolarité de Pierrafeu. Il a demandé à aller au collège privé de notre coin. Celui où il y a des classes dys et où il avait toujours refusé d’aller. Lors de notre rendez-vous, la coordinatrice des classes pour enfants avec des troubles de l’apprentissage, a décidé qu’il serait en classe haut potentiel. Elle nous a dit « j’ai même pas besoin de lire le bilan de la neuropsy ».

On espère qu’enfin il va s’épanouir. Il a aussi demandé à être interne « pour être obligé de faire ses devoirs et n’avoir pas le choix que d’aller en cours le matin ». C’est ce qu’il nous a dit. La claque pour moi. « Il faut lui faire confiance ». C’est ce que m’ont dit ma psy et la directrice du collège.
J’ai déjà mal au ventre à l’idée de passer devant son collège chaque jour. Pourtant sa décision tombe bien par rapport à mon retour au boulot comme salariée. Comme Zorro sera lui aussi interne, je n’aurais plus que deux enfants le soir. J’espère que ça marchera.

J’espère que je lâcherai un peu. Que je les laisserai grandir. Je ne me ferme aucune porte. J’essaie autre chose et j’ai pris conscience qu’il faudrait que je m’écoute et ne m’entête pas si cette nouvelle situation ne me convient pas.

J’espère trouver ma place.